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Pierrot dans le théâtre de foire au XVIIe siècle : Comédie populaire et critique sociale

Au XVIIe siècle, le théâtre de foire connaît un essor considérable en France, devenant un espace privilégié de divertissement populaire. Ces spectacles, joués en plein air lors des foires annuelles, se distinguent par leur informalisme, leur dimension interactive et leur capacité à transgresser les règles établies du théâtre classique. Parmi les figures emblématiques qui peuplent ces scènes, Pierrot occupe une place de choix, incarnant à la fois la simplicité, la naïveté et la maladresse dans des situations souvent comiques et burlesques. Bien que son origine remonte à la commedia dell’arte italienne, c’est dans le théâtre de foire que Pierrot trouve un terrain propice à une évolution particulière : celui d’un personnage profondément ancré dans les préoccupations sociales et humaines de son époque.

Le rôle de Pierrot dans ces spectacles populaires va bien au-delà de la simple farce ; il devient un miroir grossissant des inégalités sociales et des défauts humains, tout en offrant au public un moyen de se divertir et de réfléchir à travers le rire. Son caractère profondément humain, presque tragique dans ses aspirations, est en parfaite adéquation avec la nature du théâtre de foire, qui se veut à la fois léger et subversif, populaire et critique. Cet article se propose de revenir sur la place de Pierrot dans ce théâtre éphémère du XVIIe siècle, en analysant son rôle comique, sa fonction sociale et son évolution au sein de ce genre théâtral en plein développement.

Pierrot, une figure clé du théâtre de foire

Le théâtre de foire, durant le XVIIe siècle, se distingue par son caractère populaire, son esprit d’accessibilité et son éphémérité. Implanté principalement lors des foires et des célébrations publiques dans des lieux comme la Foire Saint-Germain ou la Foire du Trône à Paris, il se nourrit d’une relation directe avec le public et se démarque des conventions du théâtre académique. Dans ce cadre, Pierrot émerge comme l’un des personnages les plus significatifs, incarnant des archétypes du peuple tout en évoluant dans des rôles comiques et souvent critiques. Ce théâtre est un lieu de libre expression où la satire sociale, la comédie de situation et l’improvisation occupent une place centrale, et où Pierrot devient une figure complexe, à la fois comique, sociale et symbolique.

Le théâtre de foire : un espace de liberté et de transgression

Le théâtre de foire, bien que dérivé de formes théâtrales plus anciennes comme la commedia dell’arte, s’inscrit dans un contexte très particulier. En effet, les spectacles de foire sont des événements temporaires organisés à l’occasion des grandes fêtes populaires et foraines, où les règles théâtrales traditionnelles sont souvent mises de côté. Ces spectacles, donnés en plein air, sont plus accessibles au public populaire et se déroulent dans une ambiance de fête où l’improvisation, les gestes et les mimiques prennent le pas sur le texte écrit.

Dans ce cadre, Pierrot s’épanouit comme personnage central. Sa naïveté et sa simplicité en font une figure qui, bien qu’ancrée dans des codes comiques connus, permet aussi une forme de critique sociale. En effet, Pierrot représente une sorte d’anti-héros, un « homme ordinaire » qui, par ses erreurs, ses maladresses et son incapacité à atteindre ses idéaux, se rapproche des spectateurs, tout en incarnant une vision décalée du monde. Cette transgression des règles sociales et théâtrales devient l’une des raisons de son attrait : il s’affranchit des modèles de vertu héroïque ou tragique que l’on trouve dans d’autres formes de théâtre plus conventionnelles. Le théâtre de foire, en permettant une telle liberté de jeu, offre à Pierrot un espace où ses imperfections et ses faiblesses deviennent des éléments de sa force comique.

Pierrot dans la tradition de la commedia dell’arte

Le personnage de Pierrot trouve ses racines dans la commedia dell’arte, cette forme de théâtre populaire italienne apparue au XVIe siècle et caractérisée par ses personnages types et son improvisation. Bien que la commedia dell’arte ait eu une influence directe sur le théâtre de foire en France, Pierrot y subit une adaptation propre à son nouveau contexte. Dans la commedia dell’arte, Pierrot est déjà un personnage qui se distingue par sa simplicité et sa sincérité, un « amoureux malheureux » souvent victime de son propre cœur et des intrigues qui l’entourent.

Cependant, dans le cadre du théâtre de foire, Pierrot subit un certain décalage par rapport à ses origines. Il n’est plus seulement l’amoureux triste et mélancolique, mais devient un personnage comique par ses situations embarrassantes et ses interactions avec les autres personnages. À côté de figures comme Arlequin, plus dynamique et rusé, Pierrot est davantage un anti-héros : son manque de subtilité et sa tendance à la naïveté sont des sources constantes de comédie. Le type de Pierrot est alors accentué par des éléments de satire sociale : sa fragilité face à l’amour ou à l’autorité fait écho à la condition de l’homme ordinaire, face aux défis de la vie.

Les influences de la commedia dell’arte sont visibles dans les archétypes de Pierrot et ses interactions avec d’autres personnages. Dans les pièces de foire, il est souvent opposé à Arlequin, une figure de la ruse et de l’espièglerie. Arlequin, par ses stratégies de contournement et de manipulation, contraste fortement avec Pierrot, qui, par sa sincérité, devient la victime de ces manipulations. Cette opposition entre Pierrot et Arlequin, dans le théâtre de foire, prend ainsi une dimension sociale : Pierrot, en tant que simple et sans défense, incarne la victime du monde complexe et inégal.

Pierrot, dans le cadre du théâtre de foire du XVIIe siècle, émerge donc comme un personnage clé qui se situe à la croisée de plusieurs influences théâtrales. Héritier de la commedia dell’arte, il trouve dans le théâtre populaire un espace où ses défauts et sa naïveté se transforment en forces comiques. En mettant en avant la liberté, l’interactivité et l’improvisation, le théâtre de foire permet à Pierrot de transcender son rôle d’amoureux malheureux pour devenir une figure emblématique de la comédie de situation et un acteur de la satire sociale de son époque. C’est ainsi que Pierrot, tout en incarnant les défauts et les maladresses humaines, parvient à occuper une place essentielle dans le paysage théâtral populaire du XVIIe siècle.

Pierrot, miroir de la société et critique sociale dans le théâtre de foire

Le théâtre de foire, tout en étant un lieu de divertissement, ne se contente pas de faire rire ses spectateurs. À travers les personnages qui l’habitent, notamment Pierrot, il devient un espace privilégié pour la critique sociale, offrant une réflexion sur les tensions et les injustices sociales de l’époque. Dans un contexte où l’élite aristocratique et bourgeoise domine la scène théâtrale officielle, le théâtre de foire, avec sa portée populaire, se permet de tourner en dérision les hiérarchies sociales et de questionner les normes établies. Pierrot, par son apparence de simple valet ou d’amoureux naïf, devient ainsi un reflet des mœurs de la société de son époque, tout en incarnant un contrepoint comique à l’autorité et aux conventions sociales.

Un comique populaire et humain

Le personnage de Pierrot dans le théâtre de foire est avant tout une figure de comédie de situation, un type humain que le public reconnaît et auquel il peut s’identifier. Contrairement à d’autres personnages du théâtre de foire comme Arlequin, qui sont souvent plus dynamiques et rusés, Pierrot est dépeint comme un homme simple, souvent maladroit et naïf. Il n’a pas la vivacité d’esprit d’Arlequin, mais sa sincérité et sa gentillesse en font un personnage attachant, malgré ses travers.

Cette simplicité et cette naïveté de Pierrot répondent à un besoin social de représentation de l’homme ordinaire, celui qui, malgré ses imperfections, est le plus proche de la réalité des spectateurs. En le mettant en scène, le théâtre de foire permet au public de se reconnaître dans ce personnage, qui, par ses erreurs et ses mésaventures, dévoile la fragilité humaine. Ses maladresses et ses tentatives de séduire la belle Colombine, ses conflits avec d’autres personnages, comme Arlequin, le rendent profondément humain. Ce comique, souvent basé sur des quiproquos ou des situations où Pierrot se retrouve pris dans des malentendus, fait de lui un personnage auquel le spectateur peut à la fois s’identifier et se moquer, tout en cultivant une forme de compassion.

Ce comique populaire se distingue aussi par l’absence de grande moralité ou de vertus héroïques. Pierrot, dans sa naïveté, reste un homme ordinaire confronté à un monde qu’il ne comprend pas toujours. Dans un sens, il incarne un certain réalisme social, celui d’un individu pris dans un système plus vaste, dont il ne maîtrise ni les codes ni les rouages.

Pierrot comme critique des inégalités sociales

L’aspect le plus intéressant du personnage de Pierrot dans le théâtre de foire réside dans son rôle de critique des inégalités sociales. Tout comme dans la commedia dell’arte, où les personnages incarnent des figures sociales et des archétypes, Pierrot devient un moyen de questionner les hiérarchies et de renverser les rôles sociaux traditionnels. Bien qu’il soit un personnage souvent associé à la classe populaire, Pierrot fait face à des situations qui révèlent les fractures sociales de son époque, en particulier dans ses relations avec d’autres personnages de statut plus élevé.

Dans le théâtre de foire, il n’est pas rare que Pierrot se trouve confronté à des figures d’autorité, telles que des aristocrates ou des bourgeois, qui incarnent la hiérarchie sociale. Cependant, contrairement aux héros du théâtre classique, qui doivent souvent respecter l’ordre établi, Pierrot, par sa naïveté et ses erreurs, défie subtilement ces normes. En se retrouvant, par exemple, pris dans des situations absurdes avec des personnages de classes supérieures, il expose l’hypocrisie et les incohérences des systèmes de pouvoir.

Pierrot incarne aussi un certain renversement des rôles sociaux. Dans les scènes où il se trouve en interaction avec des figures plus rusées ou plus intelligentes, comme Arlequin, il devient une sorte de victime de l’ordre social. Ce personnage de « valet naïf » ou d’« amoureux malheureux » est souvent contraint de se battre pour son amour ou son bonheur dans un monde qui semble indifférent à ses désirs. Cette représentation des inégalités et des frustrations sociales par le biais de Pierrot permet au public de réfléchir à sa propre condition, tout en offrant un exutoire à travers l’humour.

Dans le théâtre de foire, Pierrot ne se contente pas d’être un personnage comique ; il devient une figure emblématique de la critique sociale. Par sa simplicité et ses erreurs, il met en lumière les inégalités sociales, tout en incarnant les frustrations d’un homme ordinaire face à des systèmes de pouvoir ou des idéaux inaccessibles. Ce comique populaire, ancré dans une réalité sociale palpable, permet de redéfinir les rôles traditionnels et de questionner les structures hiérarchiques de l’époque. Le personnage de Pierrot, dans ce contexte, va au-delà de la simple farce pour devenir un vecteur de réflexion sur les rapports de classe et les tensions sociales du XVIIe siècle.

L’adaptation et l’évolution du personnage dans un contexte populaire

Dans le théâtre de foire, le personnage de Pierrot ne se contente pas de figurer dans des comédies de situation. Il devient également un symbole d’adaptabilité et de flexibilité, dont les traits évoluent en fonction des attentes du public et des spécificités des spectacles. L’absence de script fixe, la liberté d’improvisation des acteurs et les nombreuses réinterprétations de Pierrot dans chaque représentation participent à une transformation constante de son rôle. Le personnage devient ainsi un miroir vivant des préoccupations sociales de l’époque, tout en s’adaptant aux différents modes de divertissement populaires.

La fluidité et l’improvisation du personnage de Pierrot

L’une des caractéristiques essentielles du théâtre de foire est l’improvisation, un aspect qui permet aux acteurs de s’adapter en temps réel aux réactions du public et aux conditions de la représentation. Pierrot, en tant que personnage emblématique de ce théâtre, n’échappe pas à cette règle. Contrairement aux personnages des théâtres plus structurés, où les répliques et les scènes suivent un ordre rigide, Pierrot se voit attribuer un rôle flexible, capable de s’adapter en fonction du contexte. Les acteurs peuvent ainsi interpréter le personnage selon leur propre vision, leurs gestes, leur manière d’interagir avec les autres personnages et de répondre aux attentes de la salle.

Dans ce cadre, Pierrot est un personnage polyvalent, dont le caractère n’est pas figé dans un modèle précis. Selon les circonstances, il peut devenir le valet maladroit et naïf, l’amoureux désespéré ou même un médiateur dans les conflits entre autres personnages. Cette liberté d’interprétation permet à Pierrot de transcender son rôle initial et d’incarner une multiplicité de facettes humaines, tout en restant fidèle à sa condition d’homme ordinaire. Ce caractère fluide, en constante évolution, fait de Pierrot une figure dynamique du théâtre de foire, et lui permet de maintenir une forte connexion avec le public, qui se sent libre d’interagir avec lui.

La pérennité de Pierrot : de la foire au théâtre moderne

Bien que Pierrot ait progressivement perdu son rôle central dans le théâtre académique au XVIIIe siècle, son influence et sa présence ne se sont pas éteintes pour autant. En évoluant dans le contexte populaire de la foire, Pierrot continue d’inspirer la scène théâtrale moderne et d’influencer des personnages dans des genres plus contemporains. Au XIXe siècle, par exemple, Pierrot trouve une place dans la pantomime et dans les spectacles de marionnettes, où son caractère, toujours fondé sur l’humour et la naïveté, se perpétue sous de nouvelles formes.

Dans la culture populaire, Pierrot continue d’être une figure utilisée pour incarner la fragilité humaine, le rêve et la poésie. Son apparition dans des œuvres comme celles de Jean-Gaspard Deburau au XIXe siècle, dans le genre de la pantomime, démontre comment Pierrot a traversé les siècles tout en restant fidèle à son essence : un personnage comique, mélancolique et universellement humain. Ce caractère intemporel fait de lui un archétype qui résiste à l’évolution du théâtre tout en s’adaptant à de nouvelles formes de représentation.

Pierrot, qui a traversé les foires du XVIIe siècle en incarnant les désirs et frustrations populaires, devient ainsi un personnage aux multiples facettes, dont les évolutions successives ne cessent d’alimenter la réflexion sur la société et la condition humaine. De la foire à la scène moderne, il continue de captiver par son innocence, sa maladresse et sa capacité à refléter les paradoxes et les complexités de l’existence humaine.

L’adaptabilité de Pierrot dans le cadre du théâtre de foire permet à ce personnage d’évoluer et de se redéfinir tout au long du XVIIe siècle. Sa fluidité, sa capacité à s’adapter à chaque situation et à chaque acteur, ainsi que son rôle dans la critique sociale, font de lui un personnage polyvalent, capable de traverser les époques. Sa pérennité, au-delà du théâtre de foire, témoigne de la force de son image populaire et de son pouvoir de représenter les préoccupations humaines, tout en restant un élément de divertissement et de réflexion. Pierrot, dans son évolution, devient ainsi un témoin de son époque, tout en s’inscrivant dans une tradition théâtrale qui transcende les frontières du temps.

La figure de Pierrot dans la postérité du théâtre de foire et son impact culturel

Après avoir dominé le théâtre de foire du XVIIe siècle, Pierrot connaît une transformation et une influence qui se prolongent au-delà de cette époque, notamment dans les arts et les formes de spectacle qui ont suivi. De l’univers de la foire à celui du théâtre de marionnettes, de la pantomime au cinéma, Pierrot trouve une place durable dans la culture populaire. Cette évolution témoigne de la pertinence continue de son caractère, à la fois comique et mélancolique, et de sa capacité à incarner les préoccupations humaines fondamentales à travers les âges.

Pierrot et la naissance de la pantomime

L’un des legs les plus notables de Pierrot du théâtre de foire du XVIIe siècle est son influence sur le développement de la pantomime au XVIIIe et XIXe siècle. Dans ces spectacles sans paroles, le personnage de Pierrot incarne à la perfection l’expression corporelle comique et émotive. C’est notamment grâce à l’acteur Jean-Gaspard Deburau, qui popularise le rôle de Pierrot dans les théâtres de marionnettes et dans la pantomime, que le personnage connaît un renouveau. Deburau, dans sa célèbre interprétation du rôle, accentue la dimension mélancolique de Pierrot, tout en mettant en avant sa simplicité et son humanité. Cette interprétation contribue à transformer Pierrot en un personnage plus universel, qui continue de toucher un public large par son expressivité et sa vulnérabilité.

La pantomime, en s’appuyant sur des gestes et des mimiques plutôt que sur des mots, trouve dans Pierrot un archétype idéal. Son langage corporel, qui allie tendresse et maladresse, fait de lui le véhicule parfait de ce théâtre visuel. De plus, en étant à la fois l’objet de moqueries et l’incarnation de la tragédie humaine, Pierrot devient le point d’ancrage d’une forme d’expression qui joue sur la dichotomie entre comique et pathos.

Pierrot dans le cinéma et la culture populaire

Le passage de Pierrot à la scène cinématographique se fait tout en douceur, car son personnage, désormais largement mythologique, s’intègre parfaitement dans le langage visuel du cinéma. Des réalisateurs comme Jean Cocteau, dans son film La Belle et la Bête (1946), puis plus tard, des cinéastes comme Marcel Carné, s’inspirent de la figure de Pierrot pour incarner un personnage à la fois poétique et un peu décalé, toujours en quête de quelque chose de plus grand que lui-même. L’image de Pierrot, en noir et blanc, avec son visage blanc et ses habits simples, devient une icône du cinéma d’antan, souvent associée à la fois à l’enfant innocent et à l’adulte égaré. Ce personnage, issu du théâtre de foire, fait l’objet d’une réinvention dans le cinéma, où il est interprété tantôt comme un être romantique et pur, tantôt comme un anti-héros à la fois drôle et tragique.

Dans la culture populaire, la figure de Pierrot continue de se manifester sous diverses formes. Elle est présente dans les bandes dessinées, les spectacles de marionnettes et même dans certaines expressions artistiques contemporaines. En effet, l’image de Pierrot, tel un clown triste, a été reprise dans des œuvres allant de la musique (comme la chanson Pierrot le Fou de Jean-Luc Godard) jusqu’à la mode, où il incarne une image de l’artiste mélancolique, un peu hors du monde, à la fois drôle et solitaire. Son caractère d’homme simple et vulnérable s’adapte toujours aux préoccupations contemporaines, que ce soit dans la littérature, les arts plastiques ou même dans la pop culture.

L’impact culturel de Pierrot, une fois sa place affirmée dans le théâtre de foire au XVIIe siècle, se poursuit et se diversifie au fil des siècles. De la pantomime aux premières heures du cinéma, jusqu’à son image d’icône artistique et populaire dans le monde contemporain, Pierrot reste une figure fondamentale de la culture visuelle et théâtrale. À travers ses multiples réinterprétations et adaptations, il continue de représenter un certain idéal de simplicité, tout en incarnant l’humain dans toute sa complexité, ses défauts et ses aspirations. Ainsi, Pierrot ne se contente pas d’être un personnage du passé ; il est un symbole vivant, toujours réactualisé, du théâtre populaire et de l’expression artistique universelle.

Pierrot, dans le contexte du théâtre de foire du XVIIe siècle, dépasse largement sa simple fonction de personnage comique pour devenir un véritable miroir de la société de son époque. Par sa simplicité et ses maladresses, il incarne l’homme ordinaire, tout en étant une figure de la critique sociale, de la satire des hiérarchies et des tensions de la société française. L’accessibilité et la liberté d’improvisation propres au théâtre de foire ont permis à ce personnage de se développer et de s’adapter au fil du temps, tout en restant profondément ancré dans une dimension humaine universelle.

Au-delà du XVIIe siècle, la figure de Pierrot s’est transformée et réinventée à travers diverses formes de spectacle, de la pantomime au cinéma, en passant par la culture populaire. Ainsi, l’histoire de Pierrot témoigne de la pérennité de ce personnage emblématique, qui a su évoluer tout en restant fidèle à sa simplicité et à sa mélancolie. Aujourd’hui encore, il continue de captiver par sa capacité à représenter les contradictions humaines, et demeure une figure indémodable, symbole de la fragilité et de l’aspiration universelle de l’homme.

Sources bibliographiques : 

Labbé, Jean. Le théâtre de foire au XVIIe siècle : Traditions et innovations. Paris : Editions théâtrales, 1992.

Boucher, Pierre. Pierrot, entre comédie et mélancolie : Le théâtre de foire et son héritage. Paris : Presses Universitaires de France, 2005.

Marot, Clément. Le théâtre de foire au XVIIe siècle et Pierrot : Récit et subversion. Toulouse : Editions universitaires du Sud, 2010.

Lemoine, Isabelle. La Comédie Italienne et la naissance de Pierrot. Paris : Gallimard, 1999.

Deburau, Jean-Gaspard. L’héritage de Pierrot : De la foire à la scène de la pantomime. Paris : L’Avant-Scène, 2015.

Gosse, Benjamin. Les personnages du théâtre de foire : Pierrot et la comédie populaire. Paris : Editions Classiques Garnier, 2001.