L’organisation des ambulances avant le Siège 1870
L’organisation des ambulances avant le Siège 1870 : initiatives pour se préparer à aider les futurs blessés !
Après la débâcle de Sedan, un autre combat s’annonce. Plus long ! Sûrement plus meurtrier ! Le Siège de Paris. C’est en effet là qu’a choisi le gouvernement de défense nationale de la Troisième République de livrer combat face aux Prussiens.
Aussi, il convient de se préparer face au siège. Et vite, au regard de la vitesse de l’avancée des troupes ennemies.
Parmi toutes ces préparations, l’organisation des ambulances est essentielle. Ce sont elles qui seront en première ligne dès que le bruit du canon retentira, tant dans la ville près des dégâts que sur les lieux d’affrontements.
Les quartiers généraux des ambulances.
Dans Paris, on installa les QG des ambulances dans des lieux prestigieux. Le premier choisi le Château des Tuileries – rien de moins que cette résidence de Napoléon III – comme le rapporte le Petit Journal du 11 septembre 1870 :
« Par ordre du président du gouvernement de la Défense nationale, le château des Tuileries, ainsi que ses dépendances, viennent d’être transformés en ambulances.
Vers cinq heures du soir, le drapeau neutre de la convention de Genève flottait sur les Tuileries.
Sur les murs, on lit ces mots Propriété nationale.
Il est à désirer qu’on applique la même mesure à tous les bâtiments de la couronne. »
Ensuite, on installa également des ambulances dans le Palais Bourbon, mais aussi dans le Palais de l’Industrie sur les Champs Elysées.
C’est également au tour de la Chambre des notaires de proposer ses services. Le Petit Journal écrit le 20 septembre 1870 :
« La chambre des notaires de Paris vient de mettra dans son local de la place du Chatelet dix lits à la disposition de la commission des ambulances. La commission d’hygiène et de salubrité publique a, dans sa séance de ce jour, voté d’unanimes remerciements à M. Say, raffineur, boulevard de la Gare, qui a généreusement offert à la consommation publique la libre disposition d’un puits artésien qui donne, dix millions de litres d’eau par jour. L’administration en a fait aussitôt exécuter les travaux de canalisation nécessaires, et cette énorme quantité d’eau est, dès à présent, utilement employée. »
Dans ce contexte, il était important pour le gouvernement de défense nationale de conserver une main sur ces organisations. Il constitua une commission adhoc pour distribuer les denrées trouvées dans la palais nationaux, « composée comme suit MM. le comte de Flavigny, président, Husson, directeur de l’assistance publique, de Madré, notaire, membre de la Société de secours aux blessés, Lacroze, médecin de la maison d’aliénés de Picpus, le docteur Chéron, Wallut, secrétaire de la commission du jardin d’acclimatation, Pochet, ingénieur des ponts et chaussées, Fougeroux, ingénieur civil. »
En outre, un « bureau des ambulances, installé à l’hôtel de ville pour la centralisation des services relatifs aux secours à donner aux blessés a décidé que le drapeau blanc de la convention de Genève ne sera désormais accordé par lui qu’aux personnes qui peuvent disposer au moins de six lits complétement installés. »
Des initiatives de bienfaisance ou religieuses
Pour un certain nombre d’entres elles, les ambulances étaient financées sur des fonds mis à disposition de personnes très aisées, notamment étrangères :
« La magnifique ambulance organisée sur le fonds de 100 000 francs, mis, à la disposition de la Société des secours aux blessés, par M. Richard Wallace, héritier de Lord Hertford, a rejoint hier le corps d’armée du général M. Edgard Quinet nous annonce en ces termes son retour à Paris »
On avait également des représentations religieuses. L’archevêque de Paris lui-même encourage son clergé dans sa lettre du 8 septembre aux prêtres de son diocèse, à accompagner ces ambulances
« Le clergé de Paris s’est offert en foule pour assister nos soldats ; les vingt et un forts qui entourent la capitale ont chacun un aumônier ; les ambulances établies sur les points attaqués seront desservies par un prêtre de la paroisse la plus rapprochée. J’ai offert, pour être convertis en ambulance, les établissements diocésains, où tous les soins corporels et spirituels seront prodigués aux blessés.
Une œuvre est on voie de création pour les pauvres orphelins que nous laissera la guerre je m’y suis associé, en promettant que vous y prendrez part dans la mesure de vos forces. En un mot, nous ferons ce qui est en notre pouvoir pour supporter virilement et pour alléger, en faveur de nos frères, l’épreuve inouïe que la Providence nous envoie. »
On comptait aussi des initiatives étrangères pour aider à constituer ces ambulances. Tout d’abord, la Suisse, comme on pouvait le lire dans le Petit Journal du 14 septembre :
« Une réunion nombreuse de Suisses habitant Paris vient de se constituer sous le titre de Société suisse de secours à Paris pendant la guerre.
Tout en restant fidèle aux principes de la neutralité, cette société a pour but de se rendre utile à la population parisienne en organisant un corps de sauvetage contre les désastres de l’incendie, et en prêtant son concours dans l’enceinte des fortifications, pour le transport des blessés aux ambulances de la Société internationale.
Les adhésions sont reçues par lettres ou personnellement chez M. Joyet, 90, rue La Fayette, où le bureau siège en permanence. »
Les espagnols n’étaient pas en reste, comme on pouvait le constater le 17 septembre :
« Avelino Valenti a l’honneur d’inviter les espagnols, ses compatriotes, résidant à Paris, à se faire inscrire sans retard, rue du Rocher 35, dans le but de former un corps d’infirmiers qui se mettront gratuitement à la disposition des ambulances pendant la durée du siège. »
Une grande loterie pour financer les ambulances parisiennes
Le Petit Journal du 14 septembre publia cette annonce, réalisée très vite, après la proclamation de la République.
« Par décision ministérielle du 6 septembre 1870, la Société internationale de secours aux blessés militaires, a été autorisée à faire une loterie pour aider à former de nouvelles ambulances, en créer de sédentaires et enfin faire tout pour secourir les soldats blessés. Cette loterie ne comprendra aucun lot en argent.
Les artistes, industriels, commerçants, etc., sont priés d’envoyer leurs dons à la direction de la loterie nationale, palais de l’Industrie, porte n° V.
On fera connaître sous peu les locaux dans Paris où l’on pourra déposer les lots. Ils seront tous catalogués avec noms et adresses des donataires.
Les personnes qui auraient à leur disposition des livres dont elles ne font pas usage, sont priées de les envoyer à la société pour le service des ambulances. »
On invitait aussi la population à fournir du matériel, ainsi que l’écrivait le Petit Journal du 15 septembre
« Des ambulances privées devront être établies sur divers points ; le public est instamment prié de vouloir bien, désormais, adresser directement aux maires tous les dons en linges, médicaments, etc.
Des approvisionnements immenses de substances désinfectantes viennent d’être introduites dans Paris. On est ainsi en mesure de prévenir énergiquement toute émanation dangereuse pour la salubrité publique. Les habitants de Paris doivent être rassurés en ce qui concerne le service des eaux pendant le siège. »
Les ambulances volantes des gardes nationales
Le centre de Paris n’était pas le seul à nécessiter la participation d’ambulance. Aussi, on prévoyait également des ambulantes volantes, pouvant sortir en dehors des fortifications pour aider les soldats blessés lors d’affrontements avec les Prussiens.
« Le service médical des gardes nationales n’est point organisé pour la guerre ; un chirurgien par bataillon, quels que soient son dévouement et son activité, ne peut suffire à toutes les exigences et faire face à toutes les nécessités. Il ne faut pas qu’un de nous reste sans soins. Il importe que le soldat sache qu’à côté de Parmi qui blesse est l’arme qui guérit.
Sous ce rapport, la sollicitude doit être infinie. Les ambulances établies dans l’intérieur de la ville répondent à des besoins réels, comme les hôpitaux et les hospices.
Les ambulances VOLANTES DES GARDES nationales sont exclusivement constituées pour le siège de Paris, et ont pour but
1° D’aller chercher les blessés au milieu du feu sur les remparts
2° De faire un premier pansement et de ramener les blessés dans l’intérieur da Paris, en les dirigeant soit dans leur famille, soit dans les ambulances intérieures, soit dans les hôpitaux.
La mission est périlleuse mais patriotique eut fortifiera le soldat dans la lutte et rassurera nos familles.
Les hommes de cœur ne nous manqueront dont pas pour accomplir cette œuvre.
Il nous faut des médecins et des hommes d’énergie. Le service médical est sous la direction du docteur Félix Roubaud.
On s’inscrit tous les jours de neuf à cinq heures à la librairie A Le Chevalier, 61, rue Richelieu et aux bureaux de l’Opinion médicale, 5, rue Feydeau.
Le registre d’inscription sera clos le samedi 17 du courant, à cinq heures.
Le lendemain dimanche, réunion des adhérents pour fixer à chacun son poste et sa mission. »
Un avis pour identifier les médecins dans chacun des quartiers
Afin de pouvoir faciliter le repérage de médecins, le Petit Journal publia un avis dans son édition du 17 septembre :
« La société de secours aux blessés va organiser dans Paris des ambulances immobiles et des ambulances fixes pour que tous les blessés soient secourus sans retard et avec le moindre déplacement possible.
Les médecins de chaque quartier sont invités à faire connaître le temps que chacun d’eux peut consacrer chaque jour à visiter et à soigner les blessés.
Les ambulances fixes et les maisons particulières où les blessés pourront être transportés, et où, conséquemment, les visites des médecins se trouveront nécessaires, seront indiquées d’une manière visible par le drapeau de la Société timbré conformément à la Convention internationale de Genève. Les ambulances volantes seront spécialement confiées aux soins des médecins de la Société.
Tout blessés sera transporté à bras d’hommes sur un brancard dans les ambulances volantes et de là il sera évacué avec toute la sollicitude possible dans les ambulances fixes à l’aide des voitures de la Société, de celles des Messageries que cette administration a bien voulu mettre à la disposition de la Société et de tout autres qui seraient offertes et reconnues commodes pour ce service. Les hommes de bonne volonté qui voudraient concourir à l’enlèvement et au transport des blessés sont invités à se faire connaître au siège de la société (Champs-Elysées, palais de l’Industrie, porte n° IV).
Quatre ambulances sont spécialement attachées au service des quatre divisions de la garde mobile existant à Paris. Ces ambulances sont pourvues de médecins et d’infirmiers pour suivre ces divisions, et d’autres ambulances seront affectées aux besoins de l’armée.
Quant aux ambulances nombreuses que la Société a envoyées dans toute la France, elles resteront hors de Paris avec tout leur personnel, afin que les blessés existants ne soient abandonnés à aucun prix avant leur rétablissement ou leur évacuation régulière sur des hôpitaux et sur des maisons particulières ou avant leur renvoi dans leurs familles. »
Sources bibliographiques :
- Le Petit Journal du 11 septembre 1870
- Le Petit Journal du 12 septembre 1870
- Le Petit Journal du 14 septembre 1870
- Le Petit Journal du 15 septembre 1870
- Le Petit Journal du 17 septembre 1870
- Le Petit Journal du 18 septembre 1870
- Le Petit journal du 20 septembre 1870
- Le Petit Journal du 21 septembre 1870
- lllustration : le vicaire de Meudon venant chercher les morts – Extrait du Monde Illustré du 1er octobre 1870 – Crédit BNF Gallica