Histoires de Paris

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Lettre

Lettre #24 – Février 2019 : Les insultes scénarisées de Mardi Gras

La lettre d’Histoires-de-Paris.fr

Février 2019 – numéro 24

Les insultes et invectives de Mardi Gras


On le sait plus ou moins, mais Paris fut longtemps célèbre pour son carnaval, notamment au XIXe siècle. Juste avant le carême, et encore davantage lors de mardi gras, les rues étaient envahies par les masques… qui s’insultaient selon des codes bien précis.

Redécouvrons ensemble ces grands moments du carnaval et plus précisément sur ces invectives étonnantes.

Repas avec l'arrivée de masques le Pautre

La promenade des masques


A Carnaval, les masques avançaient en grande procession dans les rues. Suivant les époques, ils partaient de la porte Saint Antoine (Bastille). On les trouva ensuite dans la rue Saint Honoré. Mais ce fut surtout sur les Grands boulevards qu’ils produisaient le plus bruyament, mêlant aristocrates et milieu populaire. 

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Le Carnaval par Philibert Louis Debucourt en 1810

La descente de la Courtille


Voici l’apothéose de la promenade des masques.
Au petit matin du mercredi des cendres, les masques partaient de Belleville pour rejoindre le boulevard du Temple (aujourd’hui la place de la République).
On y trouvait les scènes les plus ubuesques et fortes du Carnaval

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Descente de la Courtille dans illustration des rues de Paris par Louis Lurine

Des sketchs totalement scénarisés

On parlait même de catéchisme poissard

Chaque année, les carnavaliers se précipitaient pour acheter le catéchisme poissard. Ici, étaient repris les grandes répliques à répéter dans la rue. 

Un personnage était central : la poissarde, comme on appelait la vendeuse de poisson. Elle étaient en permanence invectivée par les passants, d’autres vendeurs mais aussi Arlequin… 

En effet, le jeu était de chercher bagarre pour passer le temps.
On hurlait ! On chantait ! On s’amusait

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carnaval de Paris - illustration de catéchisme poissard

Les grandes répliques du catéchisme poissard

« Tiens c’marpeau » « infernal’gueule à soupape » « rouchi » « double gueuse »  « maquereau » , « Vilain habitant d’Barbarie » « Vieux manche de gigot » « magot d’la Chine » « maritorne » , « bambocheur »  « race de vipère »
 

Ensuite, suivant le type de masque rencontré, on avait des insultes toutes faites. Au décrotteur, on lançait,« Monsieur Fanfan ! Qui croirait qu’il a toute ses dents » , à l’apothicaire « limonadier des postérieurs qui vend la mort dans ses liqueurs »..

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carnaval de paris issus de la trompette du Carnaval

En réalité, ces insultes et ce catéchisme provenaient d’un genre de théâtre, très couru dans les foires du XVIIIe siècle

illustration de la pipe cassée de Jean Joseph Vadé

Le genre poissard

Sur les tréteaux du théâtre de foire, le genre poissard cherchait à mettre en scène la vie parisienne populaire.
On y retrouvait donc ses grandes caractéristiques : on marchande, on se querelle, on se bat... Cela finissait souvent en mangeant et en dansant


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gravure de Dunker pour le tableau de Paris de LS Mercier - boucher

La langue française du genre poissard

Comme il mettait en scène la vie populaire, le genre empruntait aussi la langue de tous les jours, ce patois des marchés qui transformaient la conjugaison et l’orthographe.
Pour parler plus vite, les mots étaient raccourcis, des syllabes totalement mangées. 

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illustration de la pipe cassée de Jean Joseph Vadé 2e série

Jean Joseph Vadé, le grand auteur du genre

C’est Jean Joseph Vadé qui donna au genre poissard, ses heures de gloire. On l’appela, le Corneille des Halles !

Une oeuvre attira le succès plus fortement : la Pipe Cassée. Systématiquement reprise dans les catéchismes poissards, elle mettait en scène trois compères et leurs femmes se bagarrant et faisant la fête


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