Les institutions chargées des enfants trouvés avant la Révolution
Les institutions chargées des enfants trouvés avant la Révolution : spécialisées, elles tentent de suivre les besoins
On imagine volontiers que l’Etat providence est le début de la prise en charge sociale de tous, promettant une présence minimale pour tous, fondée sur des valeurs d’égalité et de fraternité.
Toutefois, le système était bien différent avant la Révolution industrielle. Mais on ne peut pas dire qu’il n’en existait pas. En effet, les préoccupations sociales n’étaient pas l’apanage des pouvoirs publics, mais liées aux communautés locales de personnes, dépendant de leurs us et coutumes.
Dans ce contexte, comment prendre en charge les enfants en situation très compliquée ?
Ainsi, en lien avec des publications co-rédigées avec Christian De la Hubaudière, auteur d’Au Sein de Paris, publié en 2016, nous allons chercher ensemble à mieux comprendre ces questions.
La constitution d’institutions et leurs bienfaiteurs
Depuis le Moyen Age et jusqu’à la Révolution, des organisations religieuses se chargèrent de l’accueil et de la prise en charge des personnes les plus en difficulté à Paris. Ainsi apparurent au Moyen Age des hôpitaux accueillant les déshérités, leur apportant un peu d’aide, de nourriture et un toit… Parmi eux, on pouvait compter des malades, mais pas seulement. Puis, avec le temps, ces hôpitaux se spécialisèrent et se transformèrent.
Pour fonctionner, ces institutions avaient besoin d’appuis et de revenus. C’était souvent à la charge du seigneur des lieux. Depuis Hugues Capet, dernier comte de Paris, la capitale était placée sous la protection royale. Le prévôt le représentait, notamment sur la rive droite. Ainsi, au fil des siècles, le roi et ses proches prenaient à leurs charges des bonnes œuvres. Certaines furent fondées par ceux-ci : nous pouvons citer dans ce contexte les Enfants Rouges, initiative de Marguerite de Navarre, sœur de François 1er.
Le roi n’était pas le seul à se préoccuper des enfants trouvés. Ainsi, la municipalité prit sa part, comme nous allons le voir, ainsi que le chapitre de Notre Dame.
Pour les membres de corporations ouvrières, il existait également des espaces de protection solidaire, au travers des confréries.
Des institutions accueillant les enfants suivant leur situation
Nos lecteurs, qui ont suivi nos publications sur le sujet, ont pu être frappés par une chose : la spécialisation des institutions à partir de l’origine des difficultés des enfants pris en charge. Ainsi, l’Hôpital de la Trinité, appelé également les Enfants bleus recueillait les enfants de parents emprisonnés ou tués. Au Saint-Esprit-en-Grève, des enfants abandonnés étaient logés. Aux Enfants rouges, les locataires avaient comme particularité d’avoir des parents étrangers à la ville de Paris ou mort à l’Hôtel Dieu. Enfin, le Chapitre Notre Dame prenaient en charge les enfants abandonnés à leurs naissances.
A chaque lieu, des raisons bien difficiles faisaient jour et pour Paris, il était important de leur trouver une solution : impossible de les laisser dans la rue, tant pour des gestes d’humanité que pour la sécurité de tous.
Les différentes institutions ne disposaient pas toutes des mêmes moyens de financement. Les Enfants bleus étaient à la charge des corporations parisiennes, qui s’engageaient à former dans leurs ateliers leurs pensionnaires. L’Hôpital du Saint-Esprit-en-Grève était financé par la municipalité. Le Chapitre Notre Dame, malgré ses revenus fonciers, avait du mal à faire face à l’afflux des enfants trouvés. Nombre d’entre eux restaient dans la misère une fois à l’âge adulte.
Un développement qui s’accélère à partir du XVIe siècle
Au Moyen Age, la ville de Paris est très dense, mais de taille mesurée. Aussi, les hôpitaux qui prennent en charge les enfants trouvés, se préoccupent aussi des malades, des pèlerins venus à Paris sans le sou…
Mais à compter du XVIe siècle et des agrandissements continuels de la ville, la situation doit changer. Paris reçoit toujours plus de nouveaux résidents, venus y chercher du travail et des opportunités. Avec eux, le nombre d’enfants trouvés augmente. La rue reste dangereuse et les bagarres un sport local. Pour cette raison, les institutions se développent, mais toujours à un rythme moins marqué que les besoins.
A partir du XVIIe siècle, une organisation se renforce et gagne en efficacité : les Filles de la Charité fondées par Saint Vincent de Paul. Elles seront très actives jusqu’à la Révolution.