Histoires de Paris

A chaque coin de rue de Paris, des histoires… souvent revues, réadaptées mais fascinantes

Histoires de litterature

Face à Paris en ruine en 4908

Face à Paris en ruine en 4908 : une vision d’apocalypse et d’émotion dans ce roman d’anticipation de Franklin

 

Avec ‘Les ruines de Paris en 4908’, Alfred Franklin nous propose un roman d’anticipation. Publié dans la seconde moitié du XIXe siècle, il raconte l’exploration venue de si loin, la Nouvelle Calédonie, de descendants de français, venus retrouver la ville des origines : Paris.

C’est au travers d’une lettre envoyée par le dirigeant de l’exploration que nous suivons cette aventure.

 

Vue sur Paris

« Nous suivîmes pendant une demi-heure environ les rives verdoyantes du fleuve, dont la largeur parait double au moins de ce qu’elle était du temps des français, si toutefois l’on s’en rapporte aux estimations de Du Laure et de Joanne. Enfin, nous gravîmes une petite colline, et arrivés au sommet, un même cri sortit de toutes nos poitrines ; devant nous se déroulait le plus imposant tableau qu’il puisse être donné à l’homme de contempler. C’était Paris, nul de nous n’en douta ; ces ruines grandioses étaient bien le tombeau de la reine du vieux monde. Dans une vallée, dont nos yeux pouvaient à peine embrasser l’étendue, se dressaient pêle-mêle des dômes, des colonnes, des portiques, des flèches élancées, des combles immenses, des frontons, des statues, des chapiteaux, des entassements, des crêtes, des corniches ; et à notre gauche, nous voyions se profiler, fier et hardi sous le ciel noir, le couronnement de l’arc de triomphal, élevé par l’un des derniers Poléons de la France à la gloire de ses armées. Aucune secousse n’a donc ébranlé la grande cité, et elle doit se retrouver telle aujourd’hui qu’elle était il y a trois mille ans, à l’heure où s’est précipitée la gigantesque avalanche de terre, de cendres et de sable sous laquelle elle est ensevelie. »

 

Les superstitions sur la ville en ruine

« Nous restâmes longtemps pensifs, absorbés dans une contemplation muette. Le silence s’était fait autour de nous, comme si, quelques habitués que nos hôtes fussent toujours à cette vue, sa grandeur produisait toujours sur eux un indéfinissable effet de terreur et de vertige. Ils ignoraient, pourtant, que de richesses, que de merveilles, que de souvenir gisaient sous ces monceaux de sable, sous cette plaine aride, où ne croit qu’une herbe chétive et jaunie. Ils disent qu’il n’y pleut jamais et que le ciel y reste toujours voilé ; une crainte superstitieuse les empêche d’y mener paître leurs troupeaux, et le plus brave n’oserait s’y aventurer la nuit. Ils racontent que certains soirs d’orages, la vie semble se réveiller dans ces abîmes.

 

Souvenirs parvenus des entrailles des ruines

« Des myriades de lueurs phosphorescentes rasent le sol, et des bruits confus retentissent dans les entrailles de la terre. Les marteaux retombent sur l’enclume, les machines sifflent, les métiers crient, les chevaux hennissent, les chariots roulent lourdement sur le pavé. Les éclats de rire se mêlent aux sanglots étouffés, les plaintes douloureuses aux ricanements moqueurs, les blasphèmes aux chastes prières. On entend les clameurs de l’orgie et les soupirs des vierges, les imprécations et les cantiques sacrés, les grincements de dents et les chants joyeux, les gémissements sourds, les cris désespérés et le murmure des voix amoureuses, les cliquetis des chaînes et le bruit des braisiers, les monceaux d’or qui s’écroulent et les râlements de la faim »

 

Sources bibliographiques :