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Eusapia Palladino à Paris : Le mystère des séances spirites et les enjeux scientifiques

La fascination pour le spiritisme à Paris à la Belle Époque

À la fin du XIXe siècle, Paris est un carrefour intellectuel où la science, la philosophie et le mysticisme se croisent. L’époque, marquée par des avancées technologiques et scientifiques majeures, voit également un regain d’intérêt pour les phénomènes surnaturels et les mystères de l’au-delà. Le spiritisme, alors en plein essor, attire des foules de curieux, mais aussi des scientifiques, fascinés par la possibilité d’une communication entre les vivants et les morts. C’est dans ce contexte que se fait connaître Eusapia Palladino, une médium italienne qui, par ses séances spirites, provoque à la fois émerveillement et scepticisme.

L’affaire Palladino à Paris, qui a lieu dans les années 1890, n’est pas qu’une simple anecdote paranormale. Elle cristallise les tensions entre la foi en l’au-delà et la rigueur scientifique, entre le désir de croire en l’impossible et la volonté de le démontrer par des preuves tangibles. C’est à Paris, capitale de la science, que la médium sera confrontée à des chercheurs de renom, parmi lesquels Camille Flammarion, qui tenteront de percer le mystère des phénomènes observés lors de ses séances. Mais Eusapia Palladino suscitera autant de scepticisme que de fascination, et son histoire marquera durablement le paysage spirite parisien, entre mystification et recherche de la vérité.

Cet article propose de revenir sur cette affaire emblématique du spiritisme à Paris, de ses origines aux débats qu’elle a suscités, en passant par l’impact qu’elle a eu sur l’évolution des études paranormales.

Eusapia Palladino : Une médium controversée

Eusapia Palladino naît en Italie en 1854, dans un environnement modeste, et son parcours de médium commence tôt, bien que ses premières manifestations de pouvoirs paranormaux soient loin d’être exceptionnelles. À l’âge de 20 ans, elle commence à se faire connaître dans son pays, attirant l’attention de divers cercles spirites. Cependant, c’est au moment où elle rejoint Paris dans les années 1890, que sa renommée prend une dimension internationale.

Palladino, dotée de prétendues capacités de communication avec les morts, devient rapidement un sujet de fascination et de débat parmi les chercheurs parisiens. Ses séances spirites attirent l’élite intellectuelle et scientifique de l’époque, parmi lesquels on trouve des figures comme le célèbre astronome Camille Flammarion, fervent défenseur du spiritisme, mais aussi des sceptiques, qui n’hésitent pas à l’examiner sous tous les angles.

Les phénomènes associés à Palladino sont à la fois spectaculaires et mystérieux. Lors de ses séances, elle est capable de faire déplacer des objets, de produire des bruits inexpliqués et, dans certains cas, de faire apparaître des “esprits” sous forme de manifestations physiques. Ses performances, souvent accompagnées de suspensions d’instruments et de tables qui se soulèvent en l’air sans cause apparente, suscitent une admiration quasi religieuse chez ses partisans, mais aussi une méfiance grandissante chez ceux qui ne croient qu’en la science.

Ce qui distingue Palladino des autres médiums de l’époque, c’est la variété et la complexité de ses manifestations, qui semblent souvent défier les lois de la physique. Des témoins affirment qu’elle pouvait, à plusieurs reprises, produire des “phénomènes objectifs”, comme le déplacement d’objets sans contact direct ou des bruits incompréhensibles, accompagnés parfois de “materializations” d’esprits – des apparitions fantomatiques qui, pour ses défenseurs, semblaient indiquer une véritable communication avec le monde spirituel.

Cependant, malgré l’enthousiasme de certains, de nombreuses voix se lèvent pour remettre en question la véracité de ces événements. Certains observateurs notent des incohérences, des comportements suspects et des indices de supercherie. Le scepticisme gagne du terrain lorsque des accusations de fraude et de manipulation émergent, bien que Palladino ait réussi à convaincre un certain nombre de chercheurs et d’admirateurs de ses capacités.

Ainsi, cette première phase de sa carrière parisienne est marquée par un amalgame complexe de fascination et de doute. Palladino devient l’incarnation même des tensions qui traversent l’époque : d’un côté, l’attrait irrésistible pour le spiritisme et l’invisible, et de l’autre, l’impératif de rigueur scientifique et de scepticisme, qui cherche à démasquer toute forme de fraude ou d’illusion. La médium devient donc un symbole des contradictions de la Belle Époque, une époque où la science et le mysticisme se heurtent, mais où les frontières entre les deux semblent de plus en plus floues.

En effet, la venue de Palladino à Paris marque le début d’un phénomène qui va au-delà de la simple curiosité spirituelle : celui de la “scientification” des phénomènes paranormaux. Les chercheurs comme Flammarion voient en elle une occasion unique de prouver la validité du spiritisme en se basant sur des méthodes expérimentales et des observations rigoureuses. Mais la présence d’un nombre croissant de sceptiques et d’investigateurs venus observer ses séances donne également lieu à une véritable controverse scientifique qui va marquer l’histoire du spiritisme et de la science du paranormal.

Le rôle d’Eusapia Palladino dans cette époque se trouve ainsi au cœur d’une évolution majeure : la transformation du spiritisme d’une croyance mystique en un objet d’étude scientifique. À travers ses séances à Paris, elle devient le point focal de ce débat brûlant entre science et mysticisme.

Les séances à Paris : Phénomènes observés et enjeux scientifiques

À Paris, les séances dirigées par Eusapia Palladino prennent rapidement une ampleur considérable. La médium ne se contente pas de réaliser des manifestations spectaculaires en privé, mais participe à des expériences publiques et, surtout, à des enquêtes scientifiques qui vont faire grand bruit. Parmi les scientifiques et chercheurs qui s’intéressent à ses séances, plusieurs noms de renom se distinguent, comme celui de Camille Flammarion, astronome et défenseur du spiritisme, qui voit dans les phénomènes observés une possible confirmation des idées spirites. Flammarion est convaincu que la science doit examiner ces événements avec une approche rigoureuse pour en évaluer la réalité.

Les séances de Palladino, qui se déroulent dans des lieux parfois secrets, prennent une forme assez codifiée. L’invitation est lancée à un groupe restreint de personnes, généralement composé de scientifiques, de journalistes et d’observateurs. La médium est installée dans une pièce sombre, les mains souvent attachées ou placées sous la table, et la séance peut durer plusieurs heures. Les manifestations, à la fois variées et inquiétantes, se produisent généralement dans une atmosphère de tension palpable.

Les phénomènes observés lors de ces séances varient d’une session à l’autre. Il n’est pas rare que des objets se déplacent sans intervention humaine apparente, que des bruits inexpliqués résonnent dans la pièce, ou que des instruments comme des tables ou des chaises semblent léviter. Certains témoins rapportent même des sensations physiques de froid intense, un “vent” ou une pression invisible qui envahit l’espace. Ces phénomènes, souvent décrits comme étant d’origine “spirituelle”, soulèvent la question du contrôle de la médium sur ces événements, mais aussi de la nature même de ces manifestations.

L’un des phénomènes les plus notables est la “materialization” de formes humaines ou d’apparitions spectrales. Ces figures, que les témoins prétendent être des esprits, apparaissent parfois de manière fugace dans la pénombre, comme des ombres indistinctes, mais parfois de manière plus tangible, à la surprise générale. Les sceptiques commencent à douter de l’authenticité de ces apparitions, estimant qu’elles sont des illusions, des projections de l’imagination ou des manipulations habiles de la part de Palladino.

Un autre aspect marquant des séances est la capacité de Palladino à produire des phénomènes physiques, comme des vibrations et des mouvements de tables ou d’objets qui semblent se soulever sous l’effet d’une force invisible. Ces phénomènes sont souvent comparés à ceux du “poltergeist”, ces événements paranormaux où des objets se déplacent spontanément et sans raison apparente. Des observateurs affirment même que des objets lourds, tels que des tables, se soulèvent et tournent dans les airs, défiant toute explication rationnelle.

Les sceptiques, cependant, n’hésitent pas à critiquer la méthode de Palladino et les conditions dans lesquelles ces séances se déroulent. Le manque de contrôle strict dans la disposition des objets, la possibilité de fraude ou de manipulation directe de l’espace, et l’absence d’explications claires pour certains phénomènes laissent place à de multiples interprétations. C’est d’ailleurs dans cette ambiance d’incertitude que l’un des plus grands défis pour la médium et ses partisans se pose : l’obligation de prouver que ces phénomènes ne sont pas le fruit de supercherie ou d’illusion collective.

Les chercheurs, pour leur part, prennent les phénomènes observés avec un certain recul. Si certains, comme Flammarion, restent fascinés par l’idée que Palladino puisse véritablement communiquer avec l’au-delà, d’autres, plus critiques, cherchent à démontrer que ces manifestations peuvent être expliquées par des causes naturelles, telles que des mouvements involontaires de la médium elle-même, des phénomènes psychologiques ou encore des effets physiques inexplicables mais non surnaturels.

En 1898, après plusieurs séances au cours desquelles des scientifiques tentent de reproduire les conditions expérimentales et de tester la véracité des phénomènes, des accusations de fraude commencent à circuler. Certains chercheurs, comme le physicien Pierre Curie, réclament une enquête plus approfondie sur les conditions des séances et les techniques utilisées par la médium pour produire les effets observés. Les critiques se multiplient lorsque certains témoignages rapportent des suspicions de manipulation, notamment concernant le déplacement d’objets sous la table, que Palladino semblait parfois faire bouger discrètement de ses mains.

Les débats autour de l’authenticité des phénomènes ne cessent de croître, et l’affaire Palladino prend une tournure de plus en plus complexe. Tandis que les partisans du spiritisme insistent sur le fait que les manifestations observées sont au-delà de toute explication rationnelle, les sceptiques ne relâchent pas leur pression et continuent de mener des expérimentations rigoureuses pour découvrir d’éventuels indices de fraude. Au-delà de la question du paranormal, ce sont les limites de la science elle-même et les frontières entre le connu et l’inconnu qui se trouvent mises en lumière.

La controverse scientifique : Entre croyance et scepticisme

La polémique entourant Eusapia Palladino atteint son apogée lorsque les scientifiques parisiens, à la fois fascinés et incrédules, commencent à se diviser. L’affaire Palladino ne se limite pas à des phénomènes inexpliqués ; elle devient un véritable champ de bataille intellectuel où les principes de la science et du spiritisme s’opposent directement. Les chercheurs, en particulier ceux du milieu scientifique académique, sont partagés entre la volonté d’étudier objectivement les manifestations de la médium et l’hostilité croissante à l’égard d’une discipline qu’ils considèrent comme irrationnelle et suspecte.

Les sceptiques, emmenés par des figures comme l’ingénieur et expérimentateur Henri de Parville, mènent des investigations méticuleuses afin de démontrer que les phénomènes de Palladino ne relèvent pas de l’inexplicable, mais peuvent être attribués à des astuces ou des manipulations. Parville se fait particulièrement remarquer en prenant des mesures rigoureuses lors des séances, en attachant les mains de la médium à la table et en appliquant des techniques de contrôle pour éviter toute fraude. Ses conclusions sont sévères : pour lui, de nombreux phénomènes ne sont que des illusions ou des manipulations cachées, opérées par Palladino ou ses complices.

Cependant, cette position n’a pas l’effet escompté. De nombreux chercheurs, dont certains sont des figures influentes du monde académique, prennent la défense de la médium. Parmi eux, le célèbre astronome Camille Flammarion, convaincu que les phénomènes observés à travers Palladino pourraient ouvrir une nouvelle dimension de la connaissance, continue de croire en la possibilité d’une communication avec l’au-delà. Selon lui, les témoignages et les expériences positives doivent l’emporter sur le doute, et il réclame un soutien scientifique plus large pour étudier les manifestations de la médium. Flammarion va même jusqu’à proposer que des séances supplémentaires soient organisées, dans un cadre plus rigide, afin de confirmer ou d’infirmer les manifestations.

Malgré les critiques, Palladino reste un personnage incontournable du mouvement spirite. Les controverses qui l’entourent soulignent les fractures sociales et intellectuelles de l’époque. D’un côté, la science moderne, de plus en plus dominée par des figures comme Claude Bernard ou Pierre Curie, tend à écarter toute explication surnaturelle, en accordant la primauté à l’expérimentation et aux faits observables. De l’autre, un public fidèle au spiritisme, cherchant une forme de consolation face à l’inconnu et la mort, continue de voir en Palladino une médiatrice entre les vivants et les défunts.

La confrontation entre ces deux visions du monde génère une sorte de polarisation qui dépasse la simple expérience médiumnique. Elle pose la question des limites de la science et du rôle du doute dans la recherche de la vérité. À une époque où la science se veut l’unique garante de la réalité objective, le spiritisme de Palladino défie la rationalité et invite à un questionnement plus profond sur la nature même de l’existence et de l’au-delà. La médium devient ainsi le centre d’un débat fondamental sur la place du surnaturel dans la société moderne.

Les débats scientifiques atteignent leur point culminant lorsqu’une série de séances publiques sont organisées, notamment sous l’égide de l’Académie des sciences, afin de déterminer une fois pour toutes la véracité des événements observés. Les protocoles rigoureux des expérimentateurs, souvent supervisés par des personnalités comme Flammarion et Parville, sont mis à l’épreuve. Mais aucune réponse définitive ne parvient à clore le débat. Les sceptiques continuent de dénoncer les incohérences et les malversations, tandis que les partisans de Palladino insistent sur le caractère authentique des phénomènes.

Cette incertitude scientifique se prolongera bien après les dernières séances publiques. En effet, l’affaire Palladino met en lumière non seulement les mystères liés au spiritisme, mais aussi les contradictions inhérentes à la quête humaine de compréhension et de vérité. La médium incarne l’énigme par excellence : elle offre des preuves qui semblent irréfutables à ses partisans, tout en restant parfaitement inaccessibles aux chercheurs désireux de prouver leur caractère illusoire. Dès lors, l’“affaire Palladino” devient une véritable rupture, marquant une frontière entre les sciences établies et les approches alternatives, tout en rappelant que, dans certains domaines, le doute fait partie intégrante de la recherche.

Le mystère d’Eusapia Palladino perdure donc, alimentant des débats et des spéculations qui dépassent largement le cadre des séances de spiritisme parisiennes. Son histoire illustre parfaitement l’opposition entre rationalisme et croyance, et témoigne de la difficulté qu’éprouvent les sociétés modernes à traiter des phénomènes qui échappent à la science conventionnelle. L’affaire Palladino n’est pas seulement l’histoire d’une médium et de ses expériences, mais aussi celle d’une époque où les frontières du possible étaient mises en question, où la science et le surnaturel se rencontraient dans un défi constant.

Les héritages et la postérité de l’affaire Palladino : Un mystère toujours vivant

L’affaire Eusapia Palladino, bien que marquée par des controverses et des débats sans fin, laisse un héritage fascinant qui dépasse largement les frontières de la période où elle s’est déroulée. L’un des éléments les plus marquants de cet héritage est sans doute la manière dont les phénomènes observés lors des séances continuent de nourrir les discussions autour du spiritisme, du paranormal et des limites de la science. En effet, les événements de 1890 à 1900, et plus largement l’œuvre de Palladino, ont contribué à la cristallisation d’une pensée nouvelle sur la possibilité d’une réalité au-delà de la matière et de la perception humaine.

Si l’affaire Palladino n’a pas permis de clore définitivement le débat entre croyants et sceptiques, elle a néanmoins ouvert une brèche importante dans le regard porté par la société sur les phénomènes dits “paranormaux”. En effet, l’attitude de la communauté scientifique et celle du grand public vis-à-vis de ces phénomènes va évoluer progressivement. Dans les décennies qui suivent, le spiritisme et le paranormal continueront d’alimenter un intérêt croissant, notamment au travers des recherches menées par des institutions comme la Société de recherches psychiques fondée par Sir William Crookes en Angleterre, et des chercheurs comme Charles Richet en France, qui s’intéresseront davantage aux phénomènes psychiques et aux possibles interactions entre les esprits et le monde physique.

Mais l’affaire Palladino aura également des répercussions sur le monde de la psychologie et de la parapsychologie. Des figures importantes, telles que Sigmund Freud et Carl Jung, s’intéresseront de plus près aux phénomènes mentaux et psychiques que Palladino incarne, comme les états de transes, les manipulations inconscientes et les phénomènes de suggestion. Bien que ces chercheurs ne s’engagent pas nécessairement sur le terrain du spiritisme, ils reconnaissent que la médium met en lumière des aspects de l’esprit humain qui étaient jusqu’alors ignorés ou minimisés par les sciences “rigides”.

En parallèle, l’affaire Palladino marquera aussi une phase importante dans l’histoire du mysticisme et du spiritisme en général. Au tournant du XXe siècle, l’idée de communication avec l’au-delà, à travers des médiums comme Palladino, devient un phénomène de plus en plus répandu. Les mouvements spirites, notamment dans le contexte de la Première Guerre mondiale, où de nombreuses familles endeuillées cherchent un réconfort, verront leur popularité croître considérablement. Les concepts de réincarnation, de survie après la mort, et de communication avec les esprits deviennent des croyances largement partagées par de nombreuses personnes, bien au-delà du cercle des chercheurs ou des adeptes du spiritisme.

Ainsi, l’héritage de Palladino est ambigu. D’une part, elle incarne l’idée d’un mystère insondable, un questionnement sur la nature de l’existence humaine et ses liens avec l’au-delà. D’autre part, elle symbolise également la confrontation entre les pouvoirs de l’esprit humain et la rationalité scientifique. Si certains considèrent ses manifestations comme des preuves irréfutables de l’existence de phénomènes paranormaux, d’autres continuent d’y voir des illusions, des tromperies, ou des phénomènes psychosomatiques qui échappent à la compréhension immédiate.

L’influence de Palladino sur la culture populaire et sur l’imaginaire collectif est aussi manifeste. Son nom continue d’évoquer le mystère, l’inexplicable, et sa figure demeure l’un des symboles les plus marquants du spiritisme à une époque où la science peine à fournir des réponses aux grandes questions métaphysiques. Ses séances sont devenues une référence dans l’histoire des phénomènes paranormaux, et ses séances ont même inspiré des écrivains et des cinéastes, alimentant l’idée que certaines forces échappent au contrôle humain et demeurent énigmatiques, même pour les esprits les plus brillants de la science.

Les nombreux témoignages des témoins de ses séances, qu’ils soient partisans du spiritisme ou sceptiques, continuent d’alimenter la discussion sur les limites de la science et les phénomènes inexpliqués. Des chercheurs contemporains en parapsychologie, tout en admettant les défaillances des expériences passées, affirment que l’affaire Palladino, avec ses mystères, n’a pas fini de poser des questions sur la relation entre le monde tangible et l’au-delà.

Dans la société moderne, alors que l’usage des nouvelles technologies ouvre de nouveaux champs d’exploration pour l’esprit humain, l’héritage de Palladino, avec ses fantômes et ses phénomènes physiques, demeure d’actualité. La question fondamentale reste la même : le monde invisible que l’on pressent est-il une réalité à part entière, ou n’est-il qu’une projection de nos désirs, de nos peurs et de notre inconscient collectif ?

Eusapia Palladino, à travers ses séances à Paris, n’a pas seulement été le témoin d’une époque, mais elle a aussi laissé un impact durable sur notre vision du monde et des phénomènes qui échappent à la raison. Son histoire est celle d’une quête humaine incessante de sens, dans une époque où la science, bien que triomphante, peine encore à cerner les mystères de la nature humaine.

L’héritage de Palladino dans la culture populaire et la quête moderne du paranormal

Au-delà de son impact dans les cercles scientifiques et intellectuels, l’affaire Eusapia Palladino a également nourri l’imaginaire collectif et continue d’influencer la culture populaire. Si les médias de l’époque ont largement relayé les événements qui ont marqué les séances de la médium, ces dernières ont également inspiré des générations de narrateurs, écrivains, cinéastes, et artistes en quête de mystère et de phénomènes surnaturels.

Les histoires d’esprits et de communications avec l’au-delà, si caractéristiques du spiritisme du XIXe siècle, ont été portées à l’écran et dans la littérature, et Palladino en tant que figure emblématique de ce mouvement continue de nourrir cette fascination pour les phénomènes inexpliqués. Les récits de médiums, de séances spirites et de maisons hantées qui ont marqué le début du XXe siècle sont indissociables de cette quête pour comprendre l’invisible, qui demeure un thème récurrent dans les films et les romans modernes. L’imaginaire collectif autour de Palladino, notamment à travers ses manifestations physiques lors des séances, a imprégné les œuvres de fiction qui cherchent à explorer la frontière floue entre le réel et le surnaturel.

En littérature, l’affaire Palladino se retrouve dans les écrits de nombreux auteurs qui, inspirés par les témoignages et les débats scientifiques, ont voulu retranscrire l’atmosphère de ces expériences mystiques. Les romans de fiction qui s’inspirent de son histoire imaginent des personnages à la recherche de la vérité sur la médium, avec un mélange de scepticisme et de croyance. Ces récits sont parfois teintés d’une profonde réflexion sur la nature de l’esprit humain et sur l’idée que le paranormal pourrait faire partie de la réalité.

Au cinéma, Palladino a inspiré des films d’horreur et de science-fiction, où le thème de l’au-delà, des esprits et des phénomènes inexplicables reste prégnant. Des films sur des médiums et des phénomènes paranormaux, comme ceux réalisés par des réalisateurs tels que Jacques Tourneur ou M. Night Shyamalan, s’inspirent indirectement de l’aura mystérieuse et des manifestations observées dans les séances de Palladino. La figure de la médium qui défie les lois de la physique et de la logique fait écho à un désir humain universel de dépasser la mort et d’entrer en contact avec un monde invisible.

Au-delà de la fiction, l’affaire Palladino continue également d’influencer les courants modernes de la parapsychologie. Des chercheurs contemporains en psychologie et en sciences sociales, tels que Jean-Michel Vives et Michel Gauquelin, se penchent sur les phénomènes psychiques en tentant de rationaliser ou d’expliquer les expériences mystiques en rapport avec la conscience humaine. Dans ce contexte, l’héritage de Palladino résonne encore aujourd’hui, car il questionne les frontières entre le normal et le paranormal, et entre la science et l’inconnu.

L’impact de Palladino sur les mouvements spirites, particulièrement après sa mort, est également considérable. Le spiritisme, loin de disparaître après les tentatives de démystification menées par les sceptiques, continue de vivre à travers des associations et des cercles de méditation. Le médium, considéré par certains comme une “porte vers l’au-delà”, voit son héritage se maintenir dans les communautés qui croient en la communication avec les esprits. En Italie, son pays natal, mais aussi dans des régions du monde où le spiritisme garde une place importante, les travaux de Palladino sont souvent cités en référence pour défendre la crédibilité du spiritisme et des phénomènes surnaturels.

De nos jours, la popularité des émissions de télévision et des livres liés au paranormal témoigne d’une attention persistante pour des sujets comme la vie après la mort et la quête des âmes perdues. Le médium, en particulier la figure de Palladino, symbolise cette éternelle curiosité humaine vis-à-vis de ce qui se trouve au-delà de la matière et de la perception quotidienne. Elle reste l’une des médiums les plus emblématiques du mouvement spirite et un des symboles les plus fascinants de l’ère moderne où science, mysticisme et technologie continuent d’interagir et de se questionner.

L’héritage de Palladino montre ainsi que l’affaire ne se limite pas à la mémoire d’une médium et de ses expériences en France, mais qu’elle fait partie d’une histoire plus vaste de la recherche humaine de sens, de vérité et de lien avec l’invisible. Chaque génération semble redécouvrir ses séances et les mystères qui les entourent, à travers un prisme nouveau, offrant une continuité à la fascination collective pour les phénomènes qui défient la logique et la compréhension humaines.

Conclusion : Eusapia Palladino, une énigme intemporelle

L’histoire d’Eusapia Palladino à Paris, marquée par ses apparitions spectaculaires et ses débats scientifiques, témoigne d’une époque de bouleversements intellectuels où science et croyances spirituelles s’affrontaient. Aujourd’hui, bien des années après les dernières séances publiques, l’affaire Palladino reste une énigme fascinante qui continue de nourrir le mystère entourant les phénomènes inexpliqués. À travers elle, la quête humaine pour comprendre l’invisible et percer les mystères de l’au-delà se poursuit, se réinventant sans cesse à travers les siècles et les générations. Que l’on adhère au spiritisme ou que l’on demeure sceptique face à ces phénomènes, l’histoire de Palladino demeure un jalon essentiel dans notre réflexion collective sur les limites de la science et l’infinité des possibles au-delà du tangible.

Sources bibliographiques :

Allan Kardec, Le Livre des Esprits, 1857.

Sir William Crookes, Researches in the Phenomena of Spiritualism, 1874.

Édouard-Marie Gatteaux, Les Médiums et les phénomènes psychiques, 1900.

Michel Gauquelin, Le Paranormal: Essai de psychologie scientifique, 1984.

Jean-Michel Vives, Les médiums: Une analyse sociologique et psychologique, 1991.

Alan Gauld, The Founders of Psychical Research, 1968.

Maurice de Fleury, Les médiums et le spiritisme dans la société française, 1898.

Pierre Delval, Les Mystères du Spiritisme, 1986.

Michel Foucault, Les Mots et les choses, 1966.

William James, The Varieties of Religious Experience, 1902.