Histoires de Paris

A chaque coin de rue de Paris, des histoires… souvent revues, réadaptées mais fascinantes

Histoires de Seine

Les curieux sur les quais de la Seine gelée

Les curieux sur les quais de la Seine gelée : quand la foule vient voir nombreuse la glace figeant le fleuve.

 

Fin 1879 ! La Seine présente un spectacle étonnant et rare : elle est gelée sur une bonne partie de son parcours. La France et Paris notamment affrontent un épisode glacial particulièrement aigüe en ce mois de décembre. Le fleuve est pris par les glaces. Les rues sont recouvertes de neige. La ville est à l’arrêt et les plus démunis sont en grande détresse.

Et pourtant, on s’attroupe sur les quais et les ponts. En effet, le parisien est particulièrement curieux. Il se précipite sur les quais de Seine dès que l’aspect du fleuve présente un caractère insolite. C’est bien sûr le cas cette année-là.

Suivons les quais en lisant la presse de l’époque.

 

Des curieux venus voir les spectacles de la Seine

Ainsi que le Petit Journal du 10 décembre le rappelle : « Le petit bras de la Seine est toujours pris ; mais les mariniers et les bateliers, dont les bateaux y stationnent, ont reçu l’ordre de rompre la glace, de crainte d’accidents. Cette sage mesure cause un réel désappointement aux nombreux gamins, qui y avaient installé leur camp général. »

Le journaliste poursuit : « Une grande quantité de mouettes s’est abattue sur le fleuve. »

Voici là plusieurs sujets de spectacle : la Seine est prise par les glaces. Des jeunes cherchent à descendre au-delà des berges pour patiner, en faisant un véritable jeu du chat et de la souris pour tromper la vigilance des policiers. Les oiseaux cherchent désespérément un moyen d’accéder à l’eau pour se nourrir.

« A trois heures de l’après-midi, une foule considérable stationnait au pont des Saints-Pères, pour voir tout un groupe de ces oiseaux, composé de plus de quinze. »  

 

Quelque jour plus tard, le 13 décembre, le Petit Journal continue sa description des curieux :

« Une grande foule stationne le long des quais pour jouir du spectacle que présente en ce moment la Seine. Les employés du service de la navigation veillent nuit et jour pour éviter les accidents. On ne saurait trop louer le zèle et le dévouement de ces modestes auxiliaires de M. Alphand. »

Ils s’intéressent alors aux activités des employés de la ville, s’affairant à maintenir la sécurité des lieux.

 

Des curieux qui regardent la glace

Bien sûr, le clou du spectacle reste tout de même la glace sur la Seine.

« Sur les quais, une foule de curieux stationne et regarde des hommes briser la glace autour des bateaux-lavoirs pour laisser couler l’eau. Il est bon de remarquer que l’hiverne commence que cette nuit à quatre heures du matin. » Petit Journal du 23 décembre 1879

« Les quais et les ponts sont toujours très animés ; une multitude de curieux viennent dans I espoir de voir la glace se rompre et s’en aller à la dérive. » Le Petit Parisien du 15 décembre 1879

Lors des crues, les passants s’amusent du parcours des débris flottants. Ces jours-là, les glaçons jouent ce rôle.

Il fallait tout de même du courage pour venir affronter le froid de l’hiver et sortir par des températures largement en dessous de 0°C.

 

Une occasion de faire des affaires

En ces temps-là, Paris voyait déambuler une multitude de petits marchands dans ses rues et sur les quais. Pour certains, impossible de laisser passer une occasion de faire des affaires, en raison du monde défilant sur les quais. Un marchand eut une belle idée et en profita, tout comme le détaille le Petit Journal du 28 décembre

« L’actualité se saisit de tout et, pour perpétuer la date de l’hiver rigoureux que nous traversons, un industriel a eu l’idée originale de frapper une médaille en cuivre portant l’inscription suivante : Hiver 1879-1880. Souvenir de mon passage sur la Seine. La vente de cette médaille a lieu aux abords de la Seine, et le Parisien pourra, ainsi, transmettre à ses petits-enfants le souvenir de cette promenade qui, depuis le commencement du siècle, n’a pu, être effectuée que deux fois. »

Les temps sont alors difficiles mais pas perdus pour tout le monde.

Et qui sait si aujourd’hui certains conservent encore précieusement cette vieille médaille en cuivre ?

 

Sources bibliographiques