Le cimetière des Innocents
Le cimetière des innocents, le grand cimetière populaire aux 15 siècles d’histoires, de légendes et de mythes.
A l’origine élaboré en dehors de la ville, le long d’une voie romaine (qui deviendra la rue Saint Denis), le cimetière des champeaux qui deviendra le cimetière des innocents devient vite le lieu d’inhumation des faubourgs de la rive droite à l’époque gallo-romaine. Une chapelle dédiée aux Saints Innocents existait déjà avant les invasions barbares du IXe siècle.
Situé à proximité des Halles où les foires attiraient les marchés, le lieu devient vite également un repère pour les brigands. Aussi, Philippe Auguste souhaita que le cimetière des innocents fût entouré d’une enceinte et fermé la nuit.
Ce lieu était devenu mythique et des croyances sur sa terre s’étaient développées au cours des siècles
En raison de l’insalubrité des lieux et d’un usage continu pendant au moins 15 siècles, le cimetière des innocents fut fermé dans les années 1780 après que les murs de la cave de maisons voisines, rue de la Lingerie ne s’écroulent sous le poids des ossements.
Le cimetière des innocents disposait de quatre charniers
Quatre charniers furent construits à l’intérieur du cimetière contre les murs : Charnier de la Vierge (ou petit charnier), Grand charnier, Charniers des écrivains et Charnier des lingères.
Il s’agissait de galeries où on déposait dans les combles les ossements et étaient composés d’arcades. Celles-ci étaient très largement décorées et construites grâce au mécénat des bourgeois parisiens.
On peut citer notamment l’arcade de Nicolas Flamel (dont la légende indiquait qu’elle comportait le mythe de la pierre philosophale) et la danse macabre (réalisée à la demande du duc de Berry, frère de Charles VI à la mémoire du duc Louis d’Orléans assassiné en 1407 rue Vieille du Temple).
En savoir plus sur Nicolas Flamel et sur la danse macabre
Le cimetière des innocents, une gestion confié au chapitre de Saint Germain l’Auxerrois et pris en charge par un fossoyeur
Jusqu’à une trentaine de paroisses parisiennes utilisèrent en partie le cimetière des innocents :
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Saint Barthélémy (dont les prisonniers de la Conciergerie, Saint Pierre des Assis, Sainte Madeleine, Sainte Croix, Saint Germain le Vieux, Sainte Marine, Saint Pierre aux bœufs, Saint Christophe, Saint Denis de la Chârtre. L’Hôtel Dieu. | Saint Benoît, Saint Côme, Saint Sulpice, Saint André des Arts. L’hôpital de la Charité. | Saint Germain l’Auxerrois, Saint Eustache, Saint Jacques de la Boucherie, Saint Sauveur, Saint Joseph, Saint Louis du Louvre, Sainte Opportune, Saint Merry, les Saints Innocents, la Basse Geôle. Les hôpitaux Sainte Catherine et du Saint Esprit. |
Les corps étaient apportés à l’ Eglise des innocents où l’office des morts démarrait. Il s’achevait au préchoir. Ensuite, suivant la richesse du défunt, il était enterré dans une tombe ou dans une fosse commune.
Selon l’Abbé Valentin Dufour, le fossoyeur prélevait au XVIIIe siècle jusqu’à, 28 livres pour les inhumations dans les chapelles d’Orgement et de Villeroy, 25 livres sous le petit charnier, et 18 livres dans les autres charniers. Partout ailleurs, le coût était de 5 livres.
Suivant la coutume, la dame de charité, trésorière de la paroisse du défunt donnait 26 sous pour les enterrements sans coffre (dont 16 étaient donné aux porteurs) pour les grands corps.
Le cimetière, lieu de vie médiévale
Comme de nombreux cimetières médiévaux, qui étaient de rares espaces ouverts au centre de la ville, il était très animé le jour au même titre que les places. En raison des halles toutes proches, il était envahi de marchands. Les bancs et étalages y étaient très présents. Au XIIe siècle, au cimetière des innocents, on y avait laissé le marché aux chevaux. Le mur de Philippe Auguste de 1186 l’entourant, le protégea un peu sans remettre toutefois en cause le marché à l’herbe et au foin. Les écrivains publics consultaient sur place également.
Ce fut aussi un lieu de prêche. Dans le Journal du Bourgeois de Paris, on raconte la venue de Frère Richard au début du XVe siècle venu prêcher. Le franciscain attira alors plus de 5 000 personnes.
Enfin, c’était un passage obligé pour les entrées royales où on y avait suffisamment de place pour pouvoir donner de plus grand mystères que sur le reste du trajet avant Notre Dame.
Après sa destruction en 1784, il fut remplacé par le marché des innocents.
De nos jours, il ne reste plus que la fontaine des innocents, élevée au XVIe siècle en bordure du cimetière et qui fut depuis profondément réaménagée.
Visiter le quartier des innocents
Place Joachim du Bellay
M° Chatelet Les Halles (Lignes 1, 4, 7, 11, 14)
Bus 67, 58, 81, 75, 76, 38, 47, 39 Arrêt Chatelet
Sources bibliographiques :
- Dufour Valentin, Etude sur le cimetière et le charnier des innocents. Paris 1874
- Thouret M. Rapport sur les exhumations du cimetière et de l’église des Saints Innocents 1789
- Heers, Jacques. La ville au Moyen Age. Pluriel. Paris 2010
Crédits photographiques : BNF – Gallica